Le sport, un levier clé de développement socioéconomique en Afrique

La Coupe d’Afrique des Nations (CAN 2023) qui s’est récemment achevée en Côte d’Ivoire sur le sacre du pays organisateur a remis le business du sport sur le devant de la scène continentale. Le grand succès de cet événement qui a duré du 13 janvier au 11 février et qui a eu des impacts significatifs en termes de construction d’infrastructures sportives pour les communautés, de création d’emplois, de recettes publicitaires générées, de sponsoring, de recettes touristiques, de vente de maillots des équipes nationales… met en exergue la place du sport dans le développement socioéconomique du continent africain.

Selon de nombreux experts, le potentiel du marché du sport africain est énorme. Même s’il n’en est encore qu’à ses balbutiements. De l’athlétisme en passant par le très populaire football, le basketball jusqu’au rugby… le business du sport peut en effet rapporter gros au continent africain. En effet, les estimations disponibles montrent que le sport ne représente que 0,5% du PIB de l’Afrique contre 5% au niveau mondial (plus de 1200 milliards d’euros). Pourquoi une si faible contribution au PIB africain alors que le sport est largement considéré comme un secteur à forte croissance et aussi comme un important levier de développement socio-économique pour le continent ? Les résultats d’un récent sondage que nous avons réalisé sur nos réseaux sociaux (LinkedIn principalement) sont éloquents. 92% des sondés estiment que le sport représente un levier clé de développement socioéconomique pour l’Afrique. Fédérateur et vecteur d’inclusion, il contribue à la cohésion sociale, à l’autonomisation des jeunes et à la création de richesse dans les pays, souligne l’étude qualitative et quantitative intitulée « Business du sport en Afrique : Diagnostic et potentialités de développement », menée en 2020 par Mazars au Maroc en collaboration avec l’African Sports & Creative Institute (ASCI).

Ce rapport montre que le marché du sport africain est relativement moins dynamique par rapport aux autres continents, même s’il est évident que le continent connaît depuis quelques années un afflux d’investissements de plus en plus important dans ce secteur, porté par une augmentation de l’organisation d’événements sportifs de haut niveau et la construction de nouvelles infrastructures de grande ampleur dans de nombreux pays tels que le Rwanda (Kigali Arena d’un montant de 108 millions de dollars US), ou encore le Sénégal (Dakar Arena). Pays organisateur de la Coupe d’Afrique des Nations 2023 (CAN) et champion en titre, la Côte d’Ivoire n’a pas non plus lésiné sur les moyens pour bâtir des infrastructures sportives aux normes internationales afin de réussir sa CAN. Ce pays d’Afrique de l’Ouest a investi près de 1 milliard d’euros dans de nombreux chantiers (en plus des stades, on note la construction ou la rénovation d’hôtels, de lieux touristiques, etc).

Outre les investissements dans les infrastructures sportives pour dynamiser le secteur, les spécialistes remarquent également une montée en charge des investissements dans la formation de qualité au profit des jeunes dans de nombreux pays. Des centaines d’écoles de formation ont ainsi vu le jour ces dernières années dans plusieurs pays africains tels que le Maroc, l’Egypte, le Sénégal, la Côte d’Ivoire, etc.

Le continent africain a tout pour profiter de son marché du sport, d’autant que l’étude menée par Mazars et l’ASCI montre que le marché mondial du sport est caractérisé par une croissance à la fois rapide et cyclique, reposant sur l'organisation de grands évènements médiatisés. « Ces derniers constituent de vrais enjeux économiques et parfois même géopolitiques pour les pays organisateurs. L'accueil de grands événements sportifs est en effet l’occasion de mettre en valeur le pays, non seulement sur le plan sportif, mais aussi touristique, culturel et économique, avec la contribution accrue à la création d’emplois et la perception de recettes fiscales importantes », fait remarquer l’étude, ajoutant que le marché mondial des événements sportifs s'élèverait à 64 milliards de dollars, avec le football qui se taille la part du lion.

A titre d’exemple, le président du comité d’organisation du Mondial 2022 au Qatar, Nasser Al-Khater, a chiffré les retombées économiques de cette compétition pour le pays organisateur à environ 17 milliards de dollars, un montant comprenant les revenus générés pendant la compétition, et également les recettes prévues après le tournoi, provenant notamment du tourisme. Pour rappel, le Qatar a investi environ 8 milliards de dollars dans l’organisation de cette compétition.

En Afrique, cet impact économique qui se traduit en termes de création d’emploi, d’investissement… est vraisemblablement encore très peu perceptible. Du moins, il y a encore un manque de données fiables pouvant l’illustrer. Cependant, de nombreux experts estiment que des efforts sont faits notamment par des gouvernements, des associations à but non lucratif et des acteurs privés pour positionner le sport comme un vecteur de développement socioéconomique. Car, selon eux, « le sport peut constituer un véritable élément fédérateur générant des idéaux et des dynamiques, favorisant l'inclusion sociale et construisant un langage compris par la société dans son ensemble ».

Parmi les initiatives phares déployées sur le continent par organismes non-étatiques pour encadrer la jeunesse africaine figure le programme NBA Cares de la National Basketball Association (Etats-Unis). A ce jour, NBA Cares a créé au moins 77 centres sur le continent afin de permettre aux jeunes de pratiquer le basketball et d’avoir par la même occasion une chance d’être recruté par un club de la NBA pour jouer au plus haut niveau. Pour ce faire, le flagship event de la NBA « Basketball sans frontières » est un tremplin pour de jeunes talents africains. Des programmes similaires existent également dans le football et dans les autres disciplines sportives sur le continent, et son souvent portés par d’anciens joueurs africains. Cependant, il revient aux Etats africains d’œuvrer à lever les obstacles qui freinent encore le développement de l’industrie du sport, et ceci passe par une volonté politique claire et une allocation de moyens adéquats.